D. Etude de cas : Oscar Pistorius

C’est le nouveau bolide des pistes d’athlétisme. Oscar Pistorius est handicapé mais grâce à ses prothèses en lame de carbone, il pourrait bien défier les valides aux JO de pékin. Ce Sud Africain de 20 ans serait le premier d’une nouvelle race d’athlètes, modifiés par la technologie pour devenir plus rapides et plus forts que leurs concurrents ordinaires.
Oscar Pistorius est amputé sous les deux genoux depuis l’âge de 11 mois, et condamné à porter des prothèses pour marcher. Il utilise des Cheetah (prothèses dévolues à la course) pour courir.
Sous son poids, elles se plient en touchant le sol, puis se détendent à la fin de la foulée, transformant une force verticale _ générée par la pression du coureur sur la piste _ en force horizontale qui le propulse en avant.


-----> Inconvénients

Ses pieds artificiels ne constituent nullement un avantage déloyal : en effet, même si Oscar Pistorius a explosé les records handisports du 100m, 200m et 4Oom, ses performances sur 100m et 200m le placent loin des meilleurs mondiaux.
Knut letcher, le spécialiste de la recherche et du développement chez Ossür (le fabriquant des Cheetah),
explique : « Les muscles d’une jambe biologique, eux aussi, se dilatent et se contractent. Mieux, ils produisent leur propre énergie, alors que la prothèse ne sert qu’ à transmettre l’énergie qui la traverse ».
Le chercheur américain Robert Gailey affirme ainsi dans une étude que l’efficacité ( quantité d’énergie produite divisée par la quantité d’énergie absorbée) des prothèses utilisées sur la piste est de 82% contre 241% pour le pied humain ; notamment parce que les tissus mous qui permettent la jonction entre le moignon et les prothèses empêchent une restitution optimale de l’énergie.
Mais ce n’est pas tout : pour compenser l’absence de mollets, Oscar Pistorius est même obligé de faire travailler
ses muscles fessiers deux fois plus qu’un sprinter valide. Il doit donc fournir deux fois plus d’efforts.
On peut ajouter à cela un autre désavantage : son départ calamiteux. Normalement, les sprinteurs débutent
Leur course penchés en avant, à la limite du déséquilibre, pendant plus de 30m. Toute la puissance de leurs jambes les pousse alors vers l’avant, leur permettant d’accélérer et d’atteindre très vite leur vitesse de pointe avant de se redresser. Juché sur ses prothèses, Oscar, lui, doit se redresser dès le départ pour ne pas tomber. Ses jambes le poussent alors vers l’avant mais aussi vers le haut. Il accélère donc beaucoup moins vite.
Enfin, la plus grosse difficulté à surmonter, ç’est la concentration. Oscar Pistorius doit en effet courir sans
sentir le sol sous ses pieds, ce qui paraît impossible : les voûtes plantaires abritent des milliers de capteurs qui donnent à chaque seconde quantité d’informations sur la vitesse, l’équilibre, l’inclinaison sur la piste…
Oscar, lui, se contente de la pression que ses prothèses exercent sur ses moignons pour ‘sentir’ la piste, à 40 cm de hauteur. A la première faute d’inattention, c’est la chute.
-----> Avantages
Ainsi, le système du pied artificiel est un désavantage évident sur une courte distance.
En revanche, sur le 400m, sa distance de prédilection, les 46’’56 d’Oscar Pistorius le placent à la sixième place
mondiale chez les valides. Sur les chronos, on constate qu’Oscar est imbattable sur la 2ème moitié de la course, qu’il court en 1’’34 de moins que ses adversaires. Il court les 200 derniers mètres plus vite que les premiers… or généralement, ç’est l’inverse !
Si Oscar résiste bien mieux à l’épuisement, ç’est parce que ses prothèses, elles, ne connaissent pas la fatigue et permettent une restitution d’énergie constante. Ainsi, « Pistorius maintient une fréquence importante tout au long de la course, alors que le pied des athlètes valides finit par s’écraser, augmentant le temps de contact au sol du pied au fur et à mesure de la course » affirme Pierre-jean Vazel, L’entraîneur du sprinteur français Ronald Pognon et statisticien de l’athlétisme.


Vers des athlètes cyborg ?
On peut donc se demander si Oscar n’est pas le premier d’une catégorie d’athlètes aux performances boostées par les nouvelles technologies.
En instaurant des membres performants et infatigables, les prothèses de demain permettront-elles de faire mieux que de vraies jambes ?
D’après Knut Letcher, « c’est impossible avec des prothèses passives comme les Cheetah. Nous sommes à 99% de l’élasticité théoriquement possible, on ne plus les améliorer. Elles resteront toujours inférieurs à des jambes biologiques qui peuvent produire leur propre énergie ». Selon lui, la seule solution serait d’ajouter des moteurs compensant l’absence de muscles, mais des appareils à la fois assez légers et puissants ne sont pas pour tout de suite…
En attendant il faudrait définir des normes à ne pas dépasser au risque de voir arriver une nouvelle forme de dopage : un peu comme les athlètes qui facilitent le transport d’oxygène par leur sang en s’injectant des drogues ; les technoloqies développées pour les prothèses pourraient être utilisées pour améliorer les jambes d’athlètes valides, il pourraient par exemple intégrer des lames en carbone dans les semelles de leurs chaussures pour bénéficier d’un effet ressort …

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